Grosse surprise l’été 2020 : Visma rachète Yuki. Pourquoi Visma ? Et pourquoi ne pas continuer à voler de vos propres ailes ?
Marc : «Pour nous aussi, c’était une surprise, car nous n’étions pas à vendre. Arco, Lucas et moi avons pris cette décision avec les autres actionnaires.
Dans le paysage belge, il y a en fait trois grands partenaires de reprise : Kluwer, Exact et le groupe Visma.
Si vous êtes repris par Kluwer, ça s’appelle “le cercueil”. Kluwer aurait aimé nous racheter, mais ça aurait été un peu comme un infanticide. Vous vendez votre entreprise, vous encaissez – et vous êtes mort. C’est-à dire que l’entreprise et le logiciel continuent d’exister, mais tous les bons collaborateurs s’en vont.
Et puis, il y a l’entreprise numéro deux, Exact. C’est aussi une belle firme. Je la connais bien, car Arco en a également été le fondateur. Exact intègre autant que possible toutes les entreprises qu’elle rachète à ses propres logiciels. Elle rachèterait tout simplement Yuki pour se débarrasser d’un concurrent gênant.
Enfin, il y a aussi Visma, qui était encore un peu l’inconnue au bataillon à ce moment-là. En février 2020, Yuki avait fait réaliser une étude de marché. On a tendance à penser que tout le monde nous connaît, mais qu’avons-nous constaté ? Avec un taux de reconnaissance d’environ 30% sur le marché général, Yuki, Exact et Kluwer étaient pratiquement ex aequo. Pas mal pour une jeune entreprise comme la nôtre. Et puis, il y avait l’outsider, avec 70% de reconnaissance : c’était Visma. Grâce au sponsoring d’une équipe cycliste professionnelle néerlandaise, avec notamment Wout Van Aert, la notoriété de la marque avait considérablement augmenté dans toute l’Europe.
Au départ, nous avons surtout écouté ce qu’ils avaient à nous dire. Chez Yuki, nous avions une certaine culture que nous voulions absolument conserver. Visma disait – et c’était presque incompréhensible pour nous – qu’il fallait absolument continuer à faire ce que nous faisions. La seule chose qu’ils voulaient, c’était un reporting solide des chiffres et une sécurité des données plus stricte. En effet, si Visma était sanctionné pour non-respect des règles du RGPD, l’amende s’élèverait à 3% du chiffre d’affaires du groupe.
Mais ce qui nous a surtout frappés, c’était que tout comme nous, Visma attache une grande importance au bien-être des collaborateurs. Tous les mois, par exemple, le groupe Visma mesure l’engagement de ses 15.000 collaborateurs avec un score eNPS. Nous le faisions aussi, même chaque semaine. Deux ans après la reprise, les collaborateurs de Yuki sont toujours enthousiastes par rapport à cette décision. Nous faisons partie d’un grand club et nous pouvons partager beaucoup de connaissances.»